Dans le cadre de la lutte contre le cancer du col de l’utérus, une attention particulière est portée sur les femmes vivant avec le VIH, qui présentent un risque jusqu’à six fois plus élevé de développer ce cancer. D’où la nécessité stratégique d’intégrer systématiquement le dépistage du col et la vaccination contre le papillomavirus humain (HPV) dans les services VIH au Tchad.
Le cancer du col de l’utérus est un fléau silencieux. En 2022, 660 000 nouveaux cas ont été enregistrés dans le monde, avec 350 000 décès, dont 94 % dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Pourtant, cette maladie est évitable à travers la vaccination et le dépistage régulier. Malheureusement, les capacités de détection précoce restent encore limitées dans de nombreux pays africains, y compris le Tchad.
Des avancées significatives sont à noter : le lancement du registre national des cancers, l’engagement à travers les campagnes Octobre Rose, ou encore l’annonce de la création d’un centre national de cancérologie.
Autant de signaux forts d’une volonté politique affirmée.Pour aller plus loin, plusieurs pistes d’action sont proposées :
1. Intégration du dépistage dans les services VIH :
– Former les prestataires VIH au frottis cervical, à l’inspection visuelle à l’acide acétique (IVA) ou aux tests HPV ADN.
– Intégrer le dépistage dans les consultations de routine des femmes vivant avec le VIH.
2. Vaccination HPV dans les services pédiatriques VIH :
– Proposer systématiquement la vaccination aux filles âgées de 9 à 15 ans, y compris celles vivant avec le VIH.
– Lier les campagnes de vaccination aux services VIH et aux programmes scolaires.
L’OMS préconise une approche intégrée.
Le Tchad peut et doit s’en inspirer pour bâtir une réponse nationale cohérente, durable et équitable face à ce cancer évitable, en particulier pour les populations les plus vulnérables.Pour que l’intégration soit pleinement efficace, il est impératif d’agir sur plusieurs leviers complémentaires :
3. Renforcement des capacitésLe développement d’une offre de soins intégrée passe par la formation continue des agents de santé :
– Former les prestataires à la prise en charge conjointe VIH-cancer du col.
– Élaborer des protocoles standardisés pour harmoniser les interventions à tous les niveaux du système de santé.
– Mettre en place un système de référence efficace pour assurer la continuité des soins et le suivi des cas dépistés positifs.
4. Mobilisation communautaire et sensibilisationLa réussite de l’intégration passe également par l’adhésion communautaire :
– S’appuyer sur les groupes de soutien aux PVVIH, les associations de femmes et les structures communautaires existantes.
– Impliquer les leaders religieux et traditionnels pour combattre les tabous et la stigmatisation.
– Diffuser des messages ciblés via les réseaux sociaux, radios communautaires, et autres médias pour atteindre les populations clés.
5. Recherche de financements et partenariatsLa pérennité des actions dépend d’un engagement financier durable :

– Mobiliser les ressources nationales, y compris le secteur privé.
– Intégrer le dépistage et la vaccination HPV dans les priorités des partenaires techniques et financiers internationaux.
– Inscrire ces actions dans le Plan National de Développement Sanitaire (PNDS) et les budgets des districts.
6. Suivi, évaluation et rechercheEnfin, un système robuste de suivi-évaluation est essentiel :
– Exploiter les données du registre national du cancer pour mesurer l’impact des interventions sur les femmes vivant avec le VIH.
– Collecter régulièrement des données sur la couverture vaccinale et les taux de dépistage dans les centres VIH.- Promouvoir la recherche opérationnelle pour adapter en continu les stratégies aux besoins locaux.
Le Tchad dispose aujourd’hui des bases nécessaires pour faire de cette intégration une réalité. Cela demande une volonté politique forte, une coordination multisectorielle, un investissement durable et un engagement communautaire. En unissant les efforts, le pays peut protéger les femmes vivant avec le VIH, sauver des vies et progresser vers l’élimination du cancer du col de l’utérus.